E fus une enfant sage et, devenue adulte, malgré les tourments de la vie, je pris soin de mettre en pratique le commandement : ton père et ta mère, tu honoreras. " Tu auras été une bonne fille, malgré tout, lâchait parfois mère dans un soupir qu'elle voulait réconfortant. Mais la solitude est douloureuse quand on a pris l'habitude d'avoir quelqu'un qui décide et assume tout au foyer ", poursuivait-elle les yeux dans le vague. Que répondre ? J'étais, selon ses dires, la plus apte à la soutenir. Sans doute parce que j'étais une fille... Ah, la complicité mère-fille qu'elle appelait de tous ses vœux, tandis que Pierre, mon jumeau, devait, comme tout homme fort, devenu chef de famille, veiller au bien-être des siens. " En 1975, choquée, dévastée, Anne, dix-huit ans, attrape le premier train pour Paris et jure de ne jamais remettre les pieds en Lorraine. Mais, vingt ans plus tard, sa mère se meurt et, par devoir, elle revient à son chevet, à Nancy. C'est alors que, dans les couloirs de l'hôpital, son passé resurgit au détour d'une phrase anodine : " On se retrouvera. " Installée provisoirement chez sa mère, elle découvre un dossier fait de lettres et de coupures de journaux. Des affaires laides, sordides, qui amènent Anne à s'interroger sur sa mère agonisante. Qui était-elle ? Que cachait-elle ? Quels liens secrets l'unissaient à cette amie d'enfance et à son fils Serge, un obsédé, un monstre ? Comment expliquer le silence d'une mère qui n'a pas su, pas pu ou pas voulu protéger sa fille ?